• Pages 6 à 10 : Chrnonique d'une voleuse : Orieul


    Ah, d’accord… la dame est adepte de la fine plaisanterie… Lorsque j’avais rencontré Orieul afin de lui proposer un rendez-vous, elle m’avait gentiment répondu : « Mais avec plaisir, ma chère, et comme tu n’as pas le pied marin, ce sera pour ce soir à la Taverne des Helvètes ». 5 000 marches. Vous avez bien lu : 5 000 marches, à l’ombre, dans un couloir à peine éclairé par quelques lanternes faiblardes, à se demander si le tenancier de ce repaire alpestre n’avait pas choisi exprès d’embrouiller nos sens en plus de nous éreinter. J’ai le pied montagnard, mais j’avais à porter, outre mes kilos harmonieusement répartis, les magnifiques bijoux arabes glanés dans une précédente interview.

    A l’agonie, je m’écroulai au sommet sur une chaise vaguement propre, scrutant les alentours, mais la liane rousse n’était pas encore là… peut-être aurais-je le temps de reprendre mon souffle pour éviter le ridicule. Mais voilà qu’eine kleine demoiselle aux tresses blondes et chausses à rayures disparaissant dans un large bermuda s’assit à côté de moi en ravalant ses poufferies (qu’on se méprenne pas, de l’action de pouffer, rire, moquer, railler, et non de pouffe, morue, cagole – ras-le-bol des procès post interviews).

    Orieul : Alors, en forme, ma brave pigiste ? Ben oui, c’est moi, Orieul !

    Bouche Dorée : Je ne t’avais pas reconnue, c’est un fameux déguisement que tu as là !

    O : J’en ai toute une panoplie ! Il faut savoir aussi que j'ai un très grand placard et que seules certaines femmes de mon équipage ont le droit de piocher à l'intérieur de temps en temps. Tu n’imagines pas comme c’est pratique, ces trucs. Quand tu t'attires des problèmes en tous genres comme écraser une tartiflette, pas du tout de mon pays, sur la face d'un pseudo tavernier, tu peux être certaine qu'il te fera la peau juste après, il était en tort, aussi, il n’avait pas mit d’oignon, le jean-foutre, j’allais pas payer non plus, il croyait quoi ! A ce moment là, j'avais eu la bonne idée d'investir dans un kimono de geisha ainsi qu'une perruque et du maquillage. Par contre ce foutu perroquet a bien failli me trahir - dommage qu'il me soit si utile sinon je l'aurai déjà mangé ! Comme il est un des rares êtres vivants à me reconnaître sous mes déguisements, du coup il se pose sur mon épaule comme si de rien n'était...et les problèmes arrivent ! Utile, utile, ça se discute, ce cher Kalua, ce voleur de perroquet, est un très mauvais collègue dans toutes les situations ! Vous lui demandez une bourse pleine de drakos, il vous rapporte une culotte et le soutien-gorge qui va avec ! Et comme si ça ne suffisait pas, il est très connu des piratesses qui étaient propriétaires des dites culottes et je me vois forcée de payer à la place du coupable. Pour un perroquet censé t’enrichir la bourse, avoue que ça se pose là !

    Un type énorme, aux moustaches filandreuses… tss tss, laissez-moi finir, des moustaches peuvent être filandreuses lorsqu’elles dégoulinent de fromage fondu (sans doute un Helvète, ils ont des drôles de mœurs)… nous apporta une marmite de la spécialité de la maison.

    O : Tu piques des morceaux de pain, tu trempes, et hop ! Ch’est fameux, hein ? Et ça donne soif ! On en était où ?

    BD : Tu me parlais de tes déguisements, tu as du faire des coups pendables avec, pas vrai ? Ouft, ça brûle !

    O : Puisque tu y tiens... Ca me fait penser qu'une fois, j'avais super faim vers minuit et comme notre cuistot a mit un verrou au frigo, c'est très dur de bouffer à certaines heures – se battre pour le capitaine, c’est à toute heure, mais la bouffe, non ! Alors j'ai pris mon petit équipement ainsi qu'une des vestes du capitaine (histoire qu'on ne me reconnaisse pas) et je suis allée me servir, peut-être vue mais pas reconnue ! Une autre qui m’a bien aidée, tiens pour la route : quelques personnes doivent se souvenir du juge de Zepiratesland qui m'avait arrêtée pour la raison que j'avais "trahi" mon précédent équipage. On chipotera sur les mots une autre - et arrête de picorer dans la fondue, faut y aller franco. Cet espèce de pervers adorait me mettre dans des situations plus horribles et humiliantes les unes que les autres mais quand sa femme l'a menacé de divorcer, j'en ai profité pour mettre une "preuve" dans la poche de monsieur le juge tout en lui piquant sa bourse et la clé des menottes ! Celui-là était pas mal ! Sinon, j'ai aussi réussi à tricher à mort au poker et à amasser 10000 drakos sous un déguisement de pauvre petite vieille dame inoffensive, tu aurais vu la tête de mes adversaires, ils n’osaient même pas râler tellement ils avaient la honte.

    BD : Quelle preuve ? Tu peux nous le confier, en exclusivité pour la Gazette, on ne dira rien, promis. De toute façon, c’est Undomiel qui trinque.

    O : Eh bien, figure-toi que j'ai tout bêtement mis dans sa poche un des vêtements féminins que me ramenait souvent Kalua, et quand je dis vêtement, c’était du léger, avec de la dentelle, il n’y avait pas à se tromper sur l’origine ! Sa propriétaire n'étant jamais venue le réclamer, celui-là, je n'ai pas eu de soucis. J'avais, au préalable, aspergé de parfum ledit vêtement pour que ce soit plus crédible. Je te raconte pas la tête du bonhomme et encore moins celle de sa femme ! Il a été chaud, le divorce, après !

    BD : Mais c’est monstrueux ! Tu n’as vraiment aucune foi !

    O : Ah, ce n’est pas pour rien qu’on m’appelle Doigts-de-Fée, j’en ai sûrement pas le caractère, mais l’adresse et la discrétion, ça, si tu trouves mieux ailleurs, ça sera encore moi mais sous un déguisement ! Pas mal, le tien, en fille du désert, je te piquerais bien l’idée pour une autre expédition, on peut planquer plein de choses dessous, un peu trop clinquant pour ce que je veux en faire, remarque, mais ça peut s’alléger facilement. C’est que je m’encroûte un peu, là, il me faut des nouveaux défis ! Je prévois quelques vols comme dérober son kilt à Charo ou encore son rasoir à McCoy mais je préfèrerais dépouiller Mamath de tout ce qu'elle sait à mon sujet ! Saramuch aussi serait une bonne cible… il faudra jouer serré sur ces coups-là, car ce n’est pas en prison qu’ils me conduiront si j’échoue !

    Ne perdant pas une miette ni de ce que disait ma compagne de table ni du pain que je dévorais, j’embrochais de ma pique acérée trois croûtons d’un coup, mauvaise stratégie, ils coulèrent à pic dans la fondue et un sourire limite carnassier apparut sur le visage d’Orieul.

    O : Perdre son bout de pain dans la fondue est très dangereux mais très distrayant ! Le premier que tu perds te donnera droit à 100 coups de bâtons, le deuxième à 100 coups de fouet et le troisième l'immense privilège d'être jetée à la mer…

    BD : Bof, j’ai l’habitude, curieusement la plupart de mes interviews se finissent dans le port, alors !

    O : Avec un poids attaché aux pieds ? Bien entendu, personne n'a encore perdu quatre bouts de pains à la suite mais là tu viens de sauter les deux premières étapes ! J’ai l’impression que tu n’as plus très faim, tu permets ?

    En un rien de temps les 5 000 marches furent dévalées selon le principe d’Archimède (toute chose plongée vers le bas est plus facile à descendre qu’à monter) et ces maudits Helvètes me jetèrent dans le port avec une marmite enchaînée à ma cheville. A peine si j’ai eu le temps de hurler…

    Saramuch : Quelle chance que j’ai pris le frais sur le pont au moment où tu passais, tu tentes des expériences complètement idiotes, permets-moi de te le dire.

    BD : La peste soit de cette grande gigue d’Orieul ! Elle m’a fascinée avec ses histoires, un régal, comme leur fondue d’ailleurs, mais faut pas lui faire confiance, à celle-là !

    Saramuch pouffa (et si elle continue, je choisirai le second sens).

    S : Lui faire confiance ? Elle est bien bonne ! Dis-moi, tu ne portais pas un collier de rubis et des bagues d’émeraude, tout à l’heure ? Et ce bracelet magnifique, il a coulé dans le port, peut-être ? Rappelle-moi qui tu interviewais, hum ?

    Bouche Dorée


     


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